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Sarkozy – Bruni : Questions sur un mariage clandestin Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
Ecrit par J.O. Harrus   
10-02-2008

Interrogé sur son éventuel mariage avec Carla Bruni, le Président de la République avait déclaré, lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008 : « C’est du sérieux, mais c’est pas le JDD qui fixera la date... Il y aura de fortes chances que vous l’appreniez quand ça sera déjà fait… ».

En effet, c’est par un communiqué de la Présidence de la République que nous apprenions le mariage des intéressés, célébré le 2 février 2008 au Palais de l’Elysée.

Au Palais de l’Elysée ? Sans publicité préalable ? Nous qui croyions qu’un mariage civil devait être nécessairement célébré à la mairie et précédé de la publication des bans…

D’où cette question : en quoi le mariage Sarkozy – Bruni a-t-il été dérogatoire au droit commun ?

Tout d’abord, il apparaît effectivement que les futurs époux ont été dispensés de bans par le Procureur de la République.

La publication des bans est exigée par l’article 63 alinéa 1er du Code civil, qui énonce que « avant la célébration du mariage, l’officier de l’état civil fera une publication par voie d’affiche apposée à la porte de la maison commune. Cette publication énoncera les prénoms, noms, professions, domiciles et résidences des futurs époux, ainsi que le lieu où le mariage devra être célébré. »

Cette affiche doit rester apposée à la porte de la mairie pendant 10 jours (cf. article 64).

Le but de cette mesure est de permettre à toute personne légalement autorisée de faire opposition au mariage projeté (pour cause de bigamie de l’un des conjoints, en raison d’une absence d’autorisation des parents, pour défaut de consentement, compte tenu d’une simulation supposée, du fait d’une parenté prohibée, etc.).

Soucieux de discrétion, le nouveau couple présidentiel a cependant sollicité et obtenu du Procureur de la République de Paris une dispense de publication.

Une telle dispense est envisagée en ces termes par l’article 169 du Code civil : « Le procureur de la République dans l’arrondissement duquel sera célébré le mariage peut dispenser, pour des causes graves, de la publication et de tout délai ou de l’affichage de la publication seulement. »

Mais y avait-il en l’espèce « causes graves » à ne pas annoncer publiquement le mariage du plus haut magistrat de France ? Il est permis d’en douter, une telle dispense étant en général réservée à des situations extrêmes et douloureuses (mariage in extremis, c’est-à-dire célébré avant le décès imminent de l’un des conjoints).

Ensuite, le maire du 8ème arrondissement de Paris était-il compétent pour célébrer ce mariage ?

Le locataire de l’Elysée n’a, sous la Vème République, jamais été domicilié au 55 rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris (8ème).

Durant leur mandat, le Général de Gaulle était inscrit sur les listes électorales de Colombey-les-deux-églises (Haute-Marne), Valéry Giscard d’Estaing votait à Chamalières (Puy-de-Dôme), François Mitterrand mettait son bulletin dans l’urne à Nevers (Nièvre) et Jacques Chirac accomplissait son devoir électoral à Sarran (Corrèze). Quid de Nicolas Sarkozy ?

Selon Le Canard Enchaîné du 30 janvier 2008, un mandataire du Château aurait sollicité, entre Noël et le jour de l’An, l’inscription de l’électeur Sarkozy sur les listes électorales du 8ème arrondissement de Paris, ce qui aurait entraîné sa radiation de celles de Neuilly-sur-Seine, où il votait depuis 1973. Il serait ainsi le premier Président de la République à voter dans le quartier de l’Elysée depuis René Coty (1954-1959)…

Enfin, le fait que le mariage présidentiel ait été célébré au Palais de l’Elysée suscite d’ultimes interrogations.

En effet, en vertu de l’article 75 alinéa 1er du Code civil, l’officier de l’état civil célèbre le mariage « à la mairie, en présence d’au moins deux témoins, ou de quatre au plus » (le mariage non contracté publiquement pouvant être attaqué sous certaines conditions – cf. article 191 du Code civil).

L’alinéa 2 précise cependant : « Toutefois, en cas d’empêchement grave, le procureur de la République du lieu du mariage pourra requérir l’officier de l’état civil de se transporter au domicile ou à la résidence de l’une des parties pour célébrer le mariage. »

Là encore, quel « empêchement grave » les futurs époux ont-ils bien pu invoquer ? Il serait intéressant de savoir comment leur requête, ainsi que l’ordonnance du Procureur de Paris ont été rédigées. Rappelons que ces dispositions s’appliquent à des situations extrêmes (hospitalisation ou incarcération de l’un des conjoints).

Bref, pour s’en tenir au droit, le remariage du chef de l’Etat a des allures de mariage clandestin…

Déjà, à l’occasion du divorce des précédents époux Sarkozy, le Juge aux Affaires familiales de Nanterre s’était déplacé au Palais de l’Elysée pour prendre acte du consentement du Président en exercice, ce qui constitue une dérogation notable (accordée en vertu de quel texte ?).

Il est vrai que les vedettes de la politique et du show-business qui divorcent au Tribunal de Grande Instance de Nanterre ont droit en général à des « audiences aménagées », c’est-à-dire des rendez-vous spéciaux avec les magistrats à des heures où ils ne risquent guère de croiser le tout-venant des futurs divorcés (ce fut le cas de Jean-Marie Le Pen en 1987, de Michel Sardou en 1998, ou de… Cécilia Sarkozy en 2007, convoqués en soirée).

Au fait, le Juge aux Affaires familiales de Nanterre pouvait-il légalement se rendre à Paris, c’est-à-dire hors de sa circonscription judiciaire, pour y entendre un justiciable ?

La réponse est affirmative, si l’on suppose que sa décision a bien été rendue à Nanterre, après audition de l’un des époux à Paris. Dans le cas contraire, Monsieur Sarkozy ne serait pas légalement divorcé, et son remariage serait nul pour cause de bigamie…

Dernière mise à jour : ( 25-09-2009 )
 

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